Intervention de John Hajdu HEYER

Mesdames et Messieurs,
Les deux motets de ce volume sont deux des ouvrages historiquement les plus importants de Lully, l’un composé au début du Grand Siècle et l'autre à son apogée. En raison de l'importance des deux œuvres de ce volume, je considère cette édition critique comme étant le travail le plus considérable que j'ai entrepris jusqu'ici, et ma reconnaissance va à ceux dont le mécénat a rendu possible cette entreprise.
Chacun des deux motets de ce volume présente plusieurs problèmes au rédacteur critique, problèmes qui s’ajoutent à ceux que les œuvres de Lully connaissent déjà normalement en raison de l'absence de manuscrits autographes.
Le Jubilate Deo de 1660, le premier motet de Lully, est conservé uniquement dans un manuscrit inachevé du XVIIIe siècle, dans lequel manque la plus grande partie de la taille du petit chœur. Ainsi était-il nécessaire de reconstruire cette partie vocale. En outre, puisqu’il n’existe aucune autre source, des erreurs de notes ont dû être corrigées sans comparaisons possibles avec d’autres sources.
Le texte du Jubilate Deo, le « motet de la paix », est très intéressant : ce n’est ni le psaume 64 (« Jubilate Deo […] psallite »), ni le psaume 98 (« Jubilate Deo […] servite »), mais un mélange, une compilation de douze psaumes différents. Cette compilation génère un texte parfaitement adapté à l’événement célébrant la paix et le mariage royal scellant celle-ci. Tout au long du texte, des amendements, ainsi que d’autres changements subtils mais importants, suggèrent que la première intention de l’auteur était de louer Louis XIV en tant que Roi ; les références à Dieu, lorsqu’elles apparaissent, semblent presque secondaires.
Le Te Deum de 1677 est, j’en suis presque certain, le plus long des grands motets du XVIIe siècle, plus étendu même que le grand Te Deum de Charpentier ou celui de Delalande. Ce Te Deum a été exécuté dans des circonstances splendides à plusieurs reprises pendant la vie de Lully et après sa mort, et en dépit des grandes dépenses exigées pour l’exécuter. Nous avons des descriptions qui nous indiquent que quand cette œuvre a été donnée, plus de cent, et parfois même plus de trois cents musiciens étaient rassemblés pour l’exécution.
Le Te Deum a été inclus dans la première édition des œuvres complètes de Lully préparée par Henri Prunières, mais cette édition n’a pris en compte aucune des directives d'exécution imprimées par Ballard dans les parties séparées de 1684. Ces directives ont été typographiées dans le style ancien avec beaucoup de soin et ont nécessité de grandes dépenses, ainsi nous donnent-elles certainement des indices sur la façon dont Lully s'attendait à ce que son Te Deum soit exécuté. Même s’il est difficile de tirer des conclusions, et il peut y avoir des arguments contre mon interprétation, je crois qu’en fait l'exécution correcte du Te Deum de Lully requiert deux orchestres et deux groupes de basse continue pour lier les deux chœurs. Cette édition fournit pour la première fois aux chefs d’orchestre l'information nécessaire pour réaliser l’oeuvre de la manière indiquée.

Remerciements
Je veux exprimer mes sincères remerciements à l’Association Lully, à Musica Gallica, à Olms Verlag et à tous ceux qui ont aidé à rendre cette édition sûre et possible. J’ai réfléchi à cette édition pendant plus de trois décennies, et nombreux sont ceux qui m’ont aidé, y compris certainement ceux qui travaillent au département de la musique de la Bibliothèque nationale de France, en particulier Mme Massip, et les bibliothécaires de la Bibliothèque municipale de Versailles. Ma chaleureuse reconnaissance va à mon relecteur et traducteur, Jean-Paul Montagnier, qui n’a pu se joindre à nous aujourd’hui, et qui a fait un travail de relecture soigneux et complet du manuscrit et a fait des suggestions utiles. Ma reconnaissance va encore à Noam Krieger pour ses nombreuses suggestions pertinentes concernant les chiffrages et ses recommandations utiles vers la fin de la préparation de ce volume.
Je suis encore très reconnaissant de l’aide apporté par plusieurs personnes présentes dans cette salle. Mon collègue Lionel Sawkins a toujours partagé son expertise avec moi à ma requête. Jérôme de la Gorce, bien sûr, a écrit le livre le plus complet sur Lully, y compris l'examen le plus complet de la musique sacrée. Herbert Schneider a préparé l’important catalogue des œuvres de Lully. Ses remarques furent d’une valeur inestimable pour cette édition. En tant que rédacteurs en chef, Jérôme et Herbert m’ont fait beaucoup de suggestions utiles, et Herbert m’a accordé la patience et l'appui pour traiter certaines des décisions éditoriales peu communes qui ont dû être résolues dans la partition. J'ai beaucoup apprécié la patience d'Herbert, de Jérôme et de Doris Wendt avec moi : il n'est pas facile en effet de régler les détails d’une publication sans rencontrer la personne, mais nous l’avons fait.

Maintenant nous sommes impatients d’entendre de grandes exécutions de ces oeuvres. Merci à vous d'avoir écouté mon français très américain, et je voudrais vous souhaiter, Mesdames et Messieurs, une bonne soirée.























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